Par Thierry MARIET, Expert-Comptable consultant chez Asartis
De plus en plus de professionnels médicaux et paramédicaux décident d’investir dans une Société Civile de Moyens pour faire des économies et améliorer leurs conditions de travail. Ce mois-ci, Asartis vous propose un tour d’horizon complet du sujet pour investir en toute sécurité.
1. Qu’est-ce qu’une société civile de moyens ?
Une Société Civile de Moyens (ou SCM) est une société à part entière.
- Elle dispose d’une personnalité morale. Elle peut donc acheter des biens (y compris un immeuble) et des services, conclure des contrats … Elle a donc des statuts et est inscrite au registre du commerce des sociétés et dispose d’un n° SIRET qui permet de l’identifier.
- Elle est constituée par au moins 2 associés (une SCM unipersonnelle est juridiquement impossible). Les associés peuvent être des personnes physiques ou morales (SCP, SELARL,…) qui exercent une profession libérale dans un secteur d’activité proche (un expert-comptable et une infirmière se mettront difficilement en SCM car ils ont peu de moyens à partager en commun).
- Une SCM a uniquement pour but de mettre en commun des moyens entre professionnels libéraux (locaux, salariés, informatique, …). Ce n’est en aucun cas une société d’exercice. Elle ne peut donc pas être propriétaire d’une patientèle (acquise ou apportée par les associés)
- Le régime juridique de la SCM est régi par l’article 36 de la loi du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles et aux sociétés en général.
- Une SCM est dirigée par un ou plusieurs gérants associés de la société. Les comptes sont approuvés en assemblée générale chaque année comme dans toute société.
2. Le fonctionnement d’une SCM
Une SCM fonctionne entre les associés comme une « tirelire ». Tout au long de l’année, les associés apportent à la société les fonds nécessaires à la mise en commun des moyens selon un budget convenu à l’avance ou en fonction des besoins. Cet argent est inscrit dans le compte courant d’associé de chaque associé. Chacun d’eux doit mettre obligatoirement « au pot » quelque soit la situation de son compte courant, car c’est la condition en fin d’année pour déduire la quote-part de charges provenant de la SCM qui lui revient.
Tout au long de l’année, la SCM paye les charges communes avec l’argent dont elle dispose.
En fin d’année, la SCM affecte toutes ses charges (en dehors des dotations aux amortissements et provisions) aux différents associés selon une clé de répartition définie entre eux en fonction de la nature de la charge répartie (loyer, électricité, assurances, salaires,…). Elle neutralise donc les charges comptabilisées par un compte de produit en contrepartie du compte courant de chaque associé.
Après l’affectation des charges, le compte courant d’associé présente un solde égal à la différence entre les avances financières effectuées et les charges affectées. Si le solde est créditeur (l’associé a avancé plus d’argent que ce qui lui a été affecté en charges), ce solde peut être remboursé par la société à l’issue de l’assemblée générale. Il peut aussi être décidé de conserver ce surplus dans la société pour faire face à des dépenses imprévues. Cela ne doit en aucun cas servir à dispenser l’associé de contribuer au pot commun (une baisse de sa participation peut en revanche être envisagée). Si, en revanche, le solde du compte courant est débiteur (les charges affectées sont supérieures aux avances faites), la situation doit être régularisée par l’associé débiteur au plus vite, par principe d’égalité et d’équité avec les autres associés.
Le résultat de la SCM est uniquement composé des produits et charges « calculées » qui n’ont pas eu d’impact sur la trésorerie. Il s’agit notamment des dotations aux amortissements et provisions ainsi que des reprises de provisions. Ce résultat est affecté en assemblée général soit en report à nouveau, soit en compte courant d’associé. Précisons que la distribution en compte courant d’associé ne peut se faire que s’il s’agit d’un bénéfice et que la société n’a plus de pertes antérieures à purger en report à nouveau débiteur.
3. La fiscalité de la SCM
Une SCM n’est pas imposable en tant que tel, ni à l’impôt sur le revenu, ni à l’impôt sur les sociétés. Ce sont les associés qui sont imposés sur leur quote-part de résultat qu’ils perçoivent de la SCM l’année de sa réalisation. La SCM établit une déclaration fiscale spécifique (la 2036) sur laquelle elle détaille l’ensemble des charges de l’année et leur répartition auprès des différents associés.
La SCM est normalement assujettie à la TVA aux taux normale (20%). Elle peut néanmoins en être exonérée à 3 conditions :
- Elle rend uniquement des services aux associés. En cas de location ou sous-location de locaux à des personnes extérieures de la société, ces produits peuvent être assujettis à la TVA si le plafond de la franchise en base est dépassé. Les conditions de la franchise, pour mémoire sont les suivantes :
- Les recettes soumises à la TVA ne dépassent pas 34 400 € l’année civile précédente (N-1)
- Les recettes soumises à la TVA ne dépassent pas 36 500 € l’année civile précédente (N-1) lorsque elles n’ont pas dépassées 34 400 € en N-1.
- En cas de dépassement 2 années de suite du seuil de 34 400 € de recettes soumises à TVA, la société est assujettie à la TVA à partir du 1er janvier suivant la 2ème année de dépassement.
- En cas de dépassement du seuil de 36 500 €, la SCM est assujettie à la TVA dès le 1er jour du mois de dépassement.
- L’activité des associés est elle-même exonérée de TVA (cas des orthophonistes)
- Les services facturés à chaque associé pour la part exacte des dépenses communes dont il a tiré bénéfice.
La SCM est assujettie à la Cotisation Foncière des Entreprises comme n’importe quelle société.
4. La sortie de la SCM
Il est possible de sortir de la SCM à tout moment (en concertation avec les autres associés) par différents moyens :
- Un autre associé déjà présent rachète les parts du sortant
- Un nouvel associé entre au capital, en accord avec les autres associés (l’agrément est indispensable dans la mesure où il s’agit d’une société civile où la responsabilité des associés est illimitée)
- La SCM procède à une réduction de capital en rachetant les parts de l’associé sortant
Les associés peuvent également décider de dissoudre la SCM d’un commun accord lorsqu’ils ne souhaitent plus partager les moyens en commun (mutation professionnelle, arrêt d’activité d’un associé, …)
5. Les points de vigilance de la SCM
S’associer dans une SCM nécessite quelques points de vigilance qu’il est nécessaire de bien connaître pour éviter quelques déconvenues.
- Le suivi juridique d’une SCM, de sa constitution à sa dissolution en passant par l’approbation annuelle des comptes, est fondamental et ne doit surtout pas être négligé. Le recours à des professionnels du droit est également conseillé pour vous permettre d’éviter les pièges d’une clause des statuts mal rédigé ou une innéquité de répartition des charges entre associés.
- La répartition des charges entre les associés doit être équitable, ce qui ne signifie pas nécessairement égalitaire. Les clés de répartition doivent être définis entre tous les associés en fonction de l’utilisation réelle de chaque moyen mis en commun (local, secrétaire, téléphone,…). Il est important que chaque associé ait connaissance de la répartition globale des charges (et pas uniquement celles qui lui sont affectées) pour limiter au maximum les sujets de discorde lors de l’approbation des comptes ou de la sortie d’un associé.
- Le suivi des comptes courants est l’un des points les plus sensible à ne pas négliger. L’assemblée générale annuelle doit être l’occasion de prendre connaissance du solde et de la composition de chaque compte courant (et pas uniquement le sien) pour permettre de détecter au plus tôt une anomalie. Si le solde d’un compte apparaît débiteur, il est nécessaire de mettre en place avec l’associé concerné un plan financier pour équilibrer le compte dans les plus brefs délais.
Conclusion
Une SCM peut vous permettre de faire des économies et de bénéficier de moyens inaccessibles lorsque l’on exerce seul (locaux plus grands, secrétaire,…). Il est cependant nécessaire de suivre régulièrement le fonctionnement de la SCM (même si on en est pas le gérant) afin de préserver l’entente entre les associés et défendre ses intérêts.
Pour en savoir plus, rendez-vous sur entreprendre.service-public.fr
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